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Dans le Tarn, On veut des moutons, pas du goudron.

À l’entrée du premier confinement, il y a plus d’un an, le président de la République affirmait : « Agissons avec force, mais retenons cela : le jour d’après … ce ne sera pas un retour au jour d’avant ». Une formule sans engagement et trompeuse, car pour Bruno Lemaire, ministre de l’Économie, des finances et de la relance, la priorité des priorités en sortie de crise sanitaire, ce sera la relance économique à tout prix … accompagnée de son cortège de projets toxiques.

Et ce samedi 17 avril avait lieu la 3e vague d’actions nationales contre la réintoxication du monde. (cf. Bilan de la journée). Initié en France le 17 juin dernier au sortir du 1er confinement, puis renouvelé le 17 novembre, ce mouvement de mobilisations part du besoin urgent de traduire en actions de terrain la nécessité de rompre avec la destruction du vivant, l’artificialisation des sols et le nihilisme marchand.

À Teulat  dans le Tarn, organisé par le PACT (Pas d’Autoroute Castres Toulouse), Stop Carrières 81, les élus de petites communes et le soutien de la Confédération Paysanne 81, ce sont plus de 500 personnes qui se sont retrouvées, pour faire une chaîne humaine et dénoncer le projet d’autoroute A69 « CASTRES-TOULOUSE ».

L’A69, c’est 56 km d’autoroute concédée en cul-de-sac (elle s’arrête à Castres), pour un demi-milliard d’euros, financée à hauteur de 60% avec l’argent public. Elle longe la nationale 126, ce qui fera de CASTRES, la première agglomération de France de moins de 60 000 habitants dotée d’une autoroute doublée d’une nationale pour un trafic ridicule de moins de 6 000 véhicules par jour sur le trajet complet. L’A69 c’est près de 500 ha de surfaces agricoles artificialisées parmi les meilleures de la région, jusqu’à 1000 ha rendus inexploitables et 10 000 ha d’impact de réaménagement foncier. C’est un territoire rural coupé en deux, des couloirs biologiques amputés, une route nationale utile à tous qui se dégraderont au profit d’une route payante à l’usage d’une minorité.

Les élus tarnais (sénateurs, parlementaires, maires) réclament cette autoroute avec des arguments futiles comme ceux du sénateur tarnais Folliot « Nous sommes la seule agglomération de France de plus de 50000 habitants sans autoroute, il nous faut une autoroute !!». Cette surenchère à l’équipement est une véritable plaie pour l’environnement, et avec l’A69 on touche au ridicule. Une autoroute est une infrastructure de transport dont la finalité est de répondre à un projet de territoire, or dans le cas présent il n’y a aucun projet conçu et pensé par les élus locaux.

Et le comble, c’est qu’ils en font eux même ce constat lors d’une réunion (mars 2020) du comité syndical pour d’élaboration du SCoT[1] du Pays d’Autan et de Cocagne :

« [], si une autorité x ou y, ou suite à un changement de gouvernement, on nous dit : « mais au fait, avant de mettre de coup de pioche, c’est quoi votre projet de territoire ? Vous avez travaillé comment ensemble votre territoire ? Il est où le document ? » Excusez-moi, on ne l’a pas ! »

On est à l’évidence dans une situation scandaleuse où l’État a déclaré une autoroute d’utilité publique sous la pression des lubies et lobbies d’élus tarnais et que ces derniers ne savent pas quoi en faire.

Ce 17 avril a donc été l’occasion de rappeler à l’État et aux élus partisans de l’autoroute, que par ce choix, ils ne nous représentent pas, mais nous imposent une réalité dont la population ne veut pas. C’est pourquoi les habitants et les élus porteurs d’une alternative[1] à l’autoroute ne lâcheront rien. Et les projets de nouvelles carrières pour fournir en remblais l’autoroute (près de 3 millions de m3 sur plus de 62 ha), qui émergent aujourd’hui et que l’État s’est bien gardé d’afficher lors de l’enquête publique en 2016, ne font qu’attiser la colère des riverains à la fois trompés et manipulés, et qui se sentent encore plus légitimes à se révolter.

Après 15 ans d’opposition au projet sur les plans techniques et juridiques, le mouvement citoyen pour l’aménagement de la RN126 et contre une autoroute, va entrer désormais dans une phase « moins consensuelle », celle de l’occupation du terrain.


[1] L’alternative à l’A69 consiste en un aménagement de la RN126 au juste besoin de déplacement des biens et des personnes, en améliorant le confort et la sécurité pour tous et en préservant les terres agricoles : ce projet a fait l’objet d’une étude financée par les communes porteuses de cette alternative : RAPPORT COMPLET et SYNTHESE.


[1] Le Schéma de cohérence territoriale (abrégé SCOT ou SCoT) est un document d’urbanisme français qui détermine, à l’échelle de plusieurs communes ou groupements de communes, un projet de territoire visant à mettre en cohérence l’ensemble des politiques sectorielles, notamment en matière d’habitat, de mobilité, d’aménagement commercial, d’environnement et de paysage.