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ZAC de l’Escalette à PIBRAC (31) : le tribunal sanctionne une destruction d’espèces protégées illégale

La Justice administrative vient d’annuler l’autorisation de défrichement et de destruction d’espèces protégées délivrée à OPPIDEA pour l’aménagement du parc d’activités (ZAC) dit “de l’Escalette”, situé sur la commune de PIBRAC (31). Malgré la saisine du tribunal depuis début 2020 par notre fédération, la société d’économie mixte a procédé aux défrichements et a ainsi illégalement détruit de nombreuses espèces animales protégées. Explications.

Dans l’aire métropolitaine toulousaine : 2000 hectares par an artificialisés ! 

Dans l’aire métropolitaine toulousaine entre 2011 et 2021, 19.635 ha d’espaces naturels, agricoles et forestiers ont été prélevés, soit une moyenne de l’ordre de 1.964 ha par an. A titre de comparaison, ce volume équivaut à deux fois la superficie de la commune de CASTRES. Malgré des impératifs de sobriété foncière récemment traduits dans la loi “Climat et Résilience”, celle-ci reste encore trop théorique dans l’agglomération toulousaine où les zones d’activités (ZAC) ne cessent de germer.

La commune de PIBRAC n’échappe pas à cette règle et aménage le parc d’activités de l’Escalette depuis 2015 sur le fondement d’une déclaration d’utilité publique et d’autorisations environnementales (loi sur l’eau et espèces protégées). Pour éviter la destruction de très nombreuses protégées, le porteur de projet et l’Etat avaient convenu d’une mesure dite “d’évitement”, consistant à préserver les espaces boisés (îlots I et G) pendant la phase de travaux et de fonctionnement de la ZAC.

Destruction illégale d’espèces protégées

Fin 2019, OPPIDEA a demandé aux services de l’Etat une modification lui permettant de défricher 5.000 m² supplémentaires au sein des boisements initialement à préserver, provoquant la destruction 25 nouvelles espèces protégées (oiseaux, chauves-souris, reptiles) situées dans ces bois. Le préfet de la Haute-Garonne s’est alors contenté de valider cette demande sans soumettre cette demande à évaluation environnementale et saisine des experts du Conseil national de protection de la nature (CNPN).

Notre association a été contrainte de saisir le tribunal administratif de TOULOUSE début 2020. Les juges ont suivi notre argumentation et ont annulé cette autorisation pour plusieurs motifs. Tout d’abord, il a été jugé que les modifications apportées au projet initial de 2015 sont substantielles et imposaient le dépôt d’une nouvelle demande (évaluation environnementale, saisine du CNPN, enquête publique) :

Dans ces conditions, eu égard à la suppression de la mesure d’évitement initiale, aux mesures limitées de reboisement et au nombre d’espèces protégées auquel l’arrêté modificatif a apporté une dérogation par rapport au projet initial, de telles modifications sont, en conséquence, de nature à entraîner des dangers et inconvénients significatifs pour les intérêts mentionnés à l’article L. 181-3 du code de l’environnement et doivent, dès lors, être regardées comme substantielles au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 181-14 du même code

Tribunal administratif de TOULOUSE, 24/10/23, n° 2000658, point n°6

D’autre part, le jugement retient que le besoin d’augmentation des capacités industrielles de la société COUGNAUD ne justifie pas de défricher le boisement concerné et ainsi détruire 25 nouvelles espèces protégées dont certaines sont menacées de disparition :

Dès lors, au vu du faible nombre d’emplois créés, de l’absence d’éléments concrets, notamment sur les finalités de ce projet, l’objectif poursuivi par le projet en litige ne présente pas un équilibre satisfaisant entre les intérêts publics en présence, en matière sociale et économique d’une part, et la protection de l’environnement d’autre part.

Tribunal administratif de TOULOUSE, 24/10/23, n° 2000658, point n°9

Pour Cécile ARGENTIN, Présidente de FNE Occitanie Pyrénées :

Depuis 40 ans l’intérêt économique, et l’argument des emplois priment sur tous les autres enjeux. Il en résulte une frénésie d’aménagements aux impacts multiples : imperméabilisation, destructions de corridors écologiques, d’espaces naturels et de forêts, et d’espèces protégées, pollutions, accroissement du trafic. Il est urgent de limiter l’expansion anarchique de ces projets destructeurs et de ne tolérer aucune dérogation au droit de l’environnement