Actualités

Séminaire Eau potable & Santé – Retours

Le 15 septembre 2025 à Toulouse, FNE Occitanie Pyrénées organisait un séminaire grand public, avec un objectif clair : sensibiliser aux enjeux cruciaux despollutions de l’eau potable et leurs impacts sur la santé humaine.

Réunissant plus de 120 personnes, des membres d’associations, de collectivités locales, des médecins et des représentants d’institutions comme l’Agence Régionale de Santé Occitanie et l’Agence de l’Eau Adour-Garonne, cette journée a été rythmée d’un dense programme. 

Revivez avec nous ce moment riche d’informations et d’échanges autour de ces enjeux qui nous touchent toutes et tous !  

Victor Denouvion

Vice-Président du Conseil Départemental de la Haute-Garonne en charge de la Bifurcation écologique et délégué au Numérique

Cécile Argentin

Présidente de FNE Occitanie Pyrénées

Une pollution généralisée des eaux

Les microplastiques, une menace invisible mais omniprésente

Comme le plomb autrefois, les plastiques dégradés en microplastiques, s’insinuent jusque dans les organismes vivants, altérant les sols et perturbant les écosystèmes. Omniprésents dans les eaux — océans, rivières, lacs, neige — ils contaminent l’eau potable, non pas tant à cause des contenants, mais avant tout des captages déjà pollués, des processus de filtration (comme le révèlent les scandales récents) et des réseaux de distribution. Cette pollution est largement sous-estimée : 98 % des microplastiques mesurent moins de 20 μm, échappant aux normes européennes actuelles. De nouvelles méthodes de détection dès 1 μm soulignent l’urgence d’un contrôle renforcé.

Gaël Le Roux

Biogéochimiste directeur de recherche CNRS

Le cas des pesticides, une contamination alarmante
sous-estimée, résultant de lacunes réglementaires

Un rapport interministériel de juin 2024 dénonce « l’échec global » de la protection de l’eau potable face aux pesticides. Des dizaines de captages sont fermés chaque année, et 5,7 % des unités de distribution sont non conformes au 30 juillet 2025.

Cette pollution est sous-estimée du fait d’une surveillance insuffisante des métabolites de pesticides et de la non prise en compte des métabolites non pertinents dans les statistiques de non-conformité. De surcroît, elle résulte d’une réglementation défaillante tant au niveau français en l’absence de limitation des pesticides dans les aires d’alimentation de captage, qu’au niveau européen : pas d’obligation de fournir des études de toxicologie sur les métabolites, pas d’interdiction des substances actives, une majorité de métabolites jugés « non pertinents ».

Une situation tout aussi préoccupante pour les PFAS

Concernant les PFAS, la situation est tout aussi préoccupante. Pour pallier à la faible lisibilité de l’état des lieux mis en ligne par le ministère de la santé, Générations Futures développe actuellement une cartographie nationale des pollutions aux PFAS pour fin 2025. Cette pollution est elle aussi sous-estimée du fait d’une limite de qualité pas assez protectrice et n’incluant pas assez de substances. C’est par exemple le cas du TFA, un PFAS et métabolite de pesticide ignoré, présent à des taux parfois très élevés comme dans le Gers, qui échappe à tous les traitements classiques de l’eau potable et représente une véritable menace pour la santé humaine.

La réglementation est défaillante car absente pour la majorité des PFAS et pour les rejets industriels (à l’exception des PFOS depuis 2023). Ces pollutions mènent à des situations ingérables pour les autorités sanitaires locales et les personnes responsables de la production et distribution de l’eau. 

Pauline Cervan

Docteur en pharmacie et toxicologue pour Générations Futures

Arnauld Cabelguenne

Pharmacien et docteur en toxicologie et cancers

De l’exposition à ces pollutions à une explosion des maladies chroniques et cancers : failles réglementaires et limites de la toxicologie environnementale

L’exposition généralisée aux pesticides est associée à une recrudescence de maladies chroniques graves et cancers. Malgré une prétendue gestion des risques, cette situation s’explique d’une part par les limites de la toxicologie environnementale, qui ne permet pas d’expérimentation humaine via des essais cliniques randomisés et repose sur des études post-exposition rendues d’autant plus compliquées du fait de l’absence de population témoin non exposée, de la durée et la multiplicité des expositions et du délai de survenue des maladies.

Cette situation s’explique d’autre part par une réglementation insuffisante. Fondées sur des seuils de référence en dessous desquels on estime que le pesticide n’aura pas d’effet délétère et extrapolées à l’humain à partir de tests sur des souris, les normes règlementaires établies par les agences telles que l’European Food Safety Autority (EFSA) présentent de nombreuses failles,

Laurence Huc

Toxicologue, directrice de recherche à l’INRAE

notamment l’arbitrage de ce qui est considéré comme effet délétère qui interroge beaucoup, la défaillance des procédures de calcul, l’ambiguïté de ce qui est rapporté ou écarté des rapports d’études et la difficulté de vérification des données brutes.

De plus, ces normes sont peu protectrices du fait de nombreux paramètres non pris en compte tels que la formulation avec adjuvants, les effets perturbateurs endocriniens à faible dose, l’effet cocktail, les modifications épigénétiques transmissibles, le délai entre exposition et la survenue des maladies. Enfin, il paraît inconcevable que trop peu départements disposent d’un registre de cancers en France, dont un seul en région Occitanie (le Tarn).

Face à ces constats préoccupants, quelles perspectives pour les générations à venir ?

La préservation de la qualité de l’eau, au cœur des politiques et accompagnements de l’Agence de l’eau Adour-Garonne

L’Agence de l’Eau Adour-Garonne déploie son 12è programme dont l’un des principaux objectifs est de protéger la ressource et la qualité de l’eau brute dans une démarche préventive.

En effet, c’est dans le contexte d’un bassin comptant 325 captages dégradés dont 95 prioritaires, que l’Agence soutient financièrement des plans d’action territoriaux et des mesures de préservation des captages sous forme d’aides agricoles. C’est d’ailleurs le cas dans le Gers à travers une démarche préventive d’accompagnement des changements de pratiques agricoles, engageant les institutions, les acteurs agricoles et les collectivités autour de la protection de 47 captages.

Agence de l’Eau Adour-Garonne

Les leviers d’actions pour la protection des captages à l’échelle d’un syndicat d’eau potable

L’Agence de l’Eau Adour-Garonne déploie son 12è programme dont l’un des principaux objectifs est de protéger la ressource et la qualité de l’eau brute dans une démarche préventive.

À travers le programme Re-Sources porté par la Région Nouvelle-Aquitaine et visant la reconquête de la qualité des eaux brutes, Eau 17 se distingue comme un modèle d’engagement en matière de protection des captages. Une coordination fine entre acteurs locaux, un accompagnement des agriculteurs vers des cultures à bas intrants, un dispositif d’aides financières directes structurant, un levier foncier largement actionné, et un label Terres de Sources impactant : ces actions illustrent le rôle clé que peuvent jouer les collectivités compétentes en eau potableet soulignentque la reconquête de la qualité de l’eau repose sur l’action collective et sur une volonté politique forte.

Sophie Goineau

Responsable cellule Re-Sources, Syndicat d’eau potable Eau 17

Et pour finir, un débat autour des leviers d’actions à impulser pour la préservation d’une eau potable de qualité 

La journée s’est ainsi clôturée par une table ronde réunissant l’Agence de l’eau Adour-Garonne, l’Agence Régionale de Santé Occitanie, et les associations Générations Futures et France Nature Environnement.

Les échanges ont porté sur l’accès à l’information, les outils de cartographie, les leviers d’action à l’échelle locale, nationale et européenne. Les associations ont formulé des demandes claires pour renforcer la réglementation et protéger durablement cette ressource vitale.

Table Ronde

Ce séminaire, dynamique et engagé, fut riche de prises de conscience et de perspectives, nous remercions vivement intervenant.es et participant.es !